case départ nautique

Mes conseils pratiques

NAVIGUER AU Près, POINT DE VUE D’UN VOYAGEUR NON RÉGATIER

Naviguer au près, c’est toujours une source d’appréhension surtout si cela dure longtemps. Voici quelques conseils pour vous améliorer et vous préparer.

Le près par force 2 / 3 Beaufort, c’est agréable, force 4, on commence à avoir des sensations, force 5, on a des émotions et des embruns. Au-delà, cela devient sportif mais tout dépend de la taille du voilier (plus il est petit et plus ce sera impressionnant). Ce qui est sûr, c’est que si le bateau ne gîte pas passé force 3, c’est que vous êtes mal réglés. Même chose si vous avez le liston en permanence dans l’eau. À vous d’adapter la surface de voile.

Voici (dans les grandes lignes) le réglage des voiles au près.

Pour optimiser, il va falloir jouer avec le fameux compromis cap / vitesse, c’est-à-dire que si vous serrez trop le vent, vous n’irez pas très vite mais vous ferez moins de route (1). À l’inverse, si vous ne serrez pas assez le vent, vous avancerez vite mais parcourrez plus de route (2).

– (1) Si la mer est calme, privilégiez le cap en bordant les voiles au maximum et en les aplatissant. Bôme dans l’axe du bateau, génois au ras des barres de flèche.
– (2) Si la mer est courte et hachée, cela freinera le voilier. Il faudra creuser un peu et ouvrir légèrement les voiles pour gagner en puissance.

À la barre, une fois que vous avez effectué vos réglages, gardez un œil sur les penons et suivez le vent.

Dans la brise, pour éviter les aulofées, il faudra choquer le chariot de GV en la gardant bordée à fond. Cela rééquilibrera le bateau et permettra de mieux encaisser les rafales. Sur certains bateaux comme le Boréal, il n’y a pas de chariot de GV. Du coup, on choque l’écoute et on blinde le hale-bas.

Pour le génois, enroulé partiellement, vous aurez une voile très creuse (surtout si elle est vieille), ce qui vous fera perdre au moins 10° en cap sur chaque bord, soit 20°. Privilégiez un foc ou une trinquette à endrailler sur étai largable, avec une surface adaptée à la force du vent. Vous pourrez bien l’étarquer et vous retrouverez une voile plate, donc du gain au vent. Lorsque le trajet est long cela peut vous faire gagner plusieurs heures ou plusieurs jours. C’est même un gage de sécurité sur une grande traversée (plus vite on traverse, moins on risque de croiser une dépression).

Si vous emmenez des néophytes, expliquez-leur qu’un voilier ne peut pas chavirer avant de prendre l’allure au près. Cette notion n’est pas évidente pour tout le monde et cela réduira le stress. Guidez-les dans leurs déplacements, indiquez-leur où se tenir, où caler leurs pieds et même où s’allonger pour se reposer (pensez à les prévenir avant de virer de bord !). Pour le confort de mon équipage et le mien, il m’est souvent arrivé de mettre le bateau à la cape le temps d’aller aux toilettes. À plat, on se décontracte plus facilement.

Rangez un peu avant de faire route au près. Tout ce qui n’est pas rangé se calera tout seul au fond du bateau. Si c’est nécessaire, pensez à fermer les vannes des toilettes. Sur certains bateaux, l’eau remonte lorsqu’elle passe sous la ligne de flottaison.

Si la route est longue, il faut penser aux repas. Or c’est souvent difficile de cuisiner au près. Il faut avoir tout fait tomber ou renverser une fois. Après, on sait.
Cuisiner peut aussi donner le mal de mer alors pour des petites routes, privilégiez les sandwichs. Ou bien anticipez et préparez un plat le matin que vous n’aurez plus qu’à faire réchauffer. Pensez à servir avant d’avoir trop faim.
Personnellement, mon plat anti-mal de mer pour une longue navigation au près (ou de nuit), ce sont des pommes de terre cuites à la vapeur avec de grosses tranches de lard fumé. C’est un plat qui tient bien dans l’estomac. Je privilégie toujours la cocotte-minute pour cuisiner au près. En effet, les bords sont hauts, cela limite les éclaboussures. On peut fermer le couvercle et même l’assurer avec un bout pour éviter qu’elle ne traverse le bateau sur un coup de gîte trop important. Une fois remplie, elle déséquilibre souvent la gazinière sur cardan. Pour la rééquilibrer, je remplis le four de bouteilles d’eau.

Avec l’expérience et si vous êtes gourmands, vous verrez que l’on peut tout cuisiner, ou presque. Sur de longues croisières, varier de bons repas est important pour le moral, surtout si vous devez faire plusieurs jours de près dans la brise.

Encore une fois, c’est sûr que naviguer au près est plaisant au début. Au-delà de 3 heures, cela devient fatiguant, puis on s’habitue.

Je me rappelle de deux grandes traversées au près avec mon Gin Fizz. Toutes les deux mémorables pour différentes raisons…
1/ une transat de la Martinique aux Açores, parcourue entièrement au près, par force 2 à 3 Beaufort et une houle d’à peine 1 m en moyenne. Elle a duré 18 jours sans même prendre un ris ni faire un virement de bord ! Exceptionnel ! On a passé notre temps à jouer sur le compromis cap / vitesse pour ne pas perdre de temps et … nous occuper.
2/ un retour des Açores vers à La Rochelle. 11 jours dont 8 à tirer des bords par force 4 à 6 Beaufort avec une mer courte et croisée de 2 à 3,50 m. Et pour couronner le tout, une panne de pilote automatique ! Ma plus éprouvante traversée ! On se relayait toutes les deux heures pour barrer en permanence mon équipier et moi. J’aurais pu choisir une meilleure fenêtre météo si je n’avais pas eu d’impératif horaire.

À vous de larguer vos amarres maintenant !

 

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